Place aux femmes

Diagnostic d'usages d'une place publique et préconisations

Bagatelle, Toulouse (31)

Juin 2018 

En collaboration avec la Mairie de Toulouse ainsi que les associations France Solidarité et Diapason

 


 

 

Dans la cadre du futur réaménagement de la place du Partage à Bagatelle, les associations de quartier France Solidarité et Diapason ont souhaité mettre en place une démarche de concertation auprès des habitant.e.s afin d’impliquer les différents usager.e.s de la place dans son aménagement, et ainsi faciliter son appropriation après le chantier. Le projet visait aussi à impliquer particulièrement les femmes qui aujourd’hui sont peu présentes dans les espaces publics du quartier. C’est dans ce cadre là que ces deux associations locales et la mairie de Toulouse ont fait appel à nos compétences pour organiser des temps de concertation.

 

 

Notre mission était donc de réaliser un diagnostic partagé des usages de la place du partage afin de rédiger des préconisations quant à son futur aménagement. Nous nous sommes ainsi organisé avec les associations du quartier afin de se répartir les actions.

Les associations locales se sont occupées des observations en remplissant une grille avec les différentes utilisations de la place en fonction des périodes de la journée. Elles ont ainsi pu noter qui occupait la place (âge, sexe, nombre de personnes), qu’est-ce que les personnes présentes faisaient et comment elles utilisaient la place (jouer, s'asseoir sur les bancs, jouer à la pétanque, discuter, etc.). Parallèlement aux relevés des usages, les associations du quartier ont questionné les habitant.e.s et usager.e.s de la place sur leurs utilisations, pourquoi il.elle.s venaient ou au contraire ne venaient pas sur la place du partage, ainsi que leurs envies en terme d’aménagement. Nous avons eu au total 56 réponses dont 50% d’hommes et 50% de femmes.

 

Afin de compléter leur travail, deux journées de concertation ont été organisées et proposaient aux habitant.e.s de participer à des ateliers installés sur la place du Partage. Nous avons fait le choix d’aller directement à leur rencontre en se positionnant dans l’espace public et en proposant des activités ludiques en continu durant l’après-midi. Ainsi, mêmes les personnes qui n’avaient que peu de temps pouvaient participer et celles qui n’étaient pas à l’aise pour s’exprimer en groupe ont pu venir échanger avec nous individuellement. Aussi, nous avons choisi d’utiliser des supports d’expression variées : écriture, expression orale, dessin, maquette, cartographie afin de permettre à tou.te.s de s’exprimer en fonction du médium qui les met les plus à l’aise. Nous avons également utilisé notre caravane atelier agissant comme un point de repère dans l’espace public et un espace de jeux pour les enfants.

 

La première journée d'atelier, nous proposions deux supports d’expression, un porteur de parole et une cartographie participative. Le premier posait la question “De quoi avez vous besoin pour vous sentir bien dans votre quartier ?”. Les habitant.e.s avaient la possibilité d’y répondre soit en dessinant, soit en écrivant leur souhaits, craintes, besoins etc. Une fois leur remarque formulée, elle était affichée pour que leurs réponses fassent écho et créent débat. Le second permettait de situer géographiquement (à l’aide de post-it organisés par un code couleur) les endroits qu’il.elle.s aiment, ceux qu’il.elle.s n’aiment pas, les souvenirs d’événements, d’histoires et enfin des idées de réaménagement à proposer. 

 



 

Pour la deuxième journée, nous avons proposé quatre supports d’expression. Le premier était une carte du quartier, sur laquelle nous demandions aux participants de tracer leurs trajets réguliers (à pied et véhiculés), en partant de la place du Partage. Le but était de comprendre quels sont les déplacements existants autour de cette place, si des axes routiers sont plus utilisés que d’autres et si des besoins liés aux déplacements existent.

 

Le deuxième était une maquette de la place du Partage. Les routes, les revêtements de sols, ainsi que la végétations étaient mobiles, des images de mobiliers/aménagements pouvaient être insérés dans la maquette. Le but de cet atelier était de permettre aux habitant.e.s de prendre conscience de l’échelle des aménagements qu’il.elle.s proposent, de ce qu’induit le fait de supprimer des espaces verts ou des stationnements, et ainsi de faire ressortir d’une autre manière ce dont il.elle.s ont besoin.

 

Le troisième était un assemblage de photographies d’aménagements existants dans divers espaces publics. Nous demandions aux participant.e.s d’exprimer leur ressenti face à ces propositions. Un code couleur de gommettes était établi : vert pour “j’aime”, rouge pour “je n’aime pas”, rose pour “je l’utiliserai” et jaune pour “je ne l’utiliserai pas”. Nous cherchions ici à ouvrir le champ des possibles, stimuler leur imagination.

 

En parallèle les enfants pouvaient écrire leurs envies pour le quartier sur des ballons de baudruche et les installer sur la place afin de donner de la visibilité à leurs rêves et créer du débat.

 



Cette collecte a abouti à la réalisation d'un diagnostic des usages et a permis de mieux comprendre le fonctionnement de la place. Aujourd’hui, la place est principalement pratiquée par les enfants des immeubles rue du Cher qui y viennent en groupe et y restent longuement. En effet, les parents peuvent les surveiller depuis la fenêtre et la place étant dans un U, les enfants restent dans un endroit protégé du trafic et des grandes routes. Ces dernier.e.s utilisent parfois les jeux mais ne sont pas très satisfait.e.s de ce qui est proposé. Ainsi il.elle.s se rendent quand il.elle.s peuvent aux jeux du “Petit Bois”, récemment installés, situés entre la rue du Cher et la place Morvan.

Des parents et essentiellement des femmes accompagnent leurs enfants (le plus souvent en bas-âge) pour jouer sur la place, elles s’assoient ainsi sur les bancs ou le muret qui sert d’assise pour les surveiller. Parfois les mamans profitent de cet instant pour se retrouver entre elles, discuter et se détente.

 

 

Des adolescent.e.s et jeunes adultes viennent également en groupe pour discuter et passer le temps. Il.elle.s s’assoient généralement sur les bancs devant les locaux associatifs, parfois certain.e.s ramènent leurs propres chaises pour agrandir le groupe. Il arrive également qu’il.elle.s aient des vélos et/ou des scooter. Il.elle.s se réunissent plutôt en fin de journée. Enfin, certain.e.s adultes et des personnes âgées, viennent passer le temps sur les bancs, généralement en petits groupes (2-3 personnes), il.elle.s s’assoient à l’ombre pour discuter, souvent en fin d’après-midi.

Finalement, la place est plutôt fréquentée que ce soit par les enfants ou les adultes, même si les usages et les occupations restent différentes en fonction des âges et du sexe. 

 

 

 

 

 

Un besoin important d'espaces de jeux

La plupart des personnes rencontrées sont d'accord sur le fait que cette place reste un espace de jeux pour les enfants. Ils aimeraient des jeux plus nombreux et adaptés aux enfants.

 

Un besoin de sécurisation de la place

Un manque de sécurisation liés aux déplacements rapides des voitures ou scooter fait que certains parents ne sont pas rassurés à l'idée de laisser leurs enfants venir jouer dans cet espace.

 

Des stationnements et déplacements problématiques

Il manque des places de stationnement mais en même temps les stationnements déjà existants surchargent la place et la rendent parfois dangereuse. Une étude plus approfondie sur les déplacements ainsi sur le stationnement aurait été opportune pour compléter le diagnostic.

 

Une végétation dense qui porte à débat

Plusieurs personnes se sont plaintes des nombreux arbres : ils diminuent la visibilité de ce qui se passe sur la place et les tilleuls salissent la place et les voitures. Les enfants et leurs accompagnant apprécient au contraire qu'il y ait de l'ombre et de la végétation qui rend la place agréable surtout en été. 

 

Un manque de visibilité des associations

Enfin, de nombreux habitant.e.s n'étaient pas au courant qu'il y avait des locaux d'associations sur la place, certains pensant même que le bâtiment était fermé et inutilisé. Ce constat révèle un vrai manque de visibilité de ces associations qui pourtant peuvent être très utiles pour les habitants du quartier. Ce phénomène peut être expliqué par l'architecture du bâtiment qui n'invite pas les curieu.x.se.s à rentrer, les portes sont pleines et peu de liens visuels existent entre l'intérieur et l'extérieur. Aussi, il y a un réel manque de signalétique pour indiquer les activités qui se passent à l’intérieur du bâtiment.  


 

A partir de ces constats nous avons proposé cinq axes concrets pour retravailler les aménagements et usages de la place : Améliorer les espaces de jeux, Renforcer la convivialité, Repenser la place de la voiture et les circulations, Lier les associations locales au quartier, Embellir le quartier. 

Nous avons également réalisé des préconisations quant à l'implication habitante dans la suite du projet : réaliser des chantiers ouverts pour fabriquer avec les habitants des aménagements  : bancs, tables, jeux, peintures au sol, signalétique, bacs de jardinage et compostage. Le chantier ouvert, lieu de rencontre, d'échange et de partage est également l'occasion de créer une histoire collective et d'affirmer l'identité du quartier. De plus la participation des habitant.e.s dans la construction de leurs espaces publics assure également un plus grand attachement, un meilleur entretien et l'appropriation de ces espaces une fois le chantier terminé.

 

 

 

Afin de montrer le travail effectué aux habitant.e.s et de s’assurer de la cohérence de notre diagnostic avec leurs besoins et attentes, nous avons organisé une soirée de restitution. Nous avons choisi un vendredi soir afin de toucher un large public. Aussi, nous avons voulu cette soirée conviviale et avons proposé un repas partagé.

La restitution s’est faîte de manière assez informelle. Nous avions affiché sur la place, des grands panneaux reprenant les grandes lignes du diagnostic ainsi que les préconisations principales sous forme de schémas afin d’en faciliter la compréhension. Ainsi les habitant.e.s et passant.e.s pouvaient regarder librement les panneaux, discuter entre elles.eux, nous poser des questions, réagir, etc.